Même si l'on n'est pas féru de custom en général et de Harley Davidson en particulier, le nom de Sportster résonne forcément à quiconque possède une certaine culture motocycliste. C'est que, depuis plus 65 ans (le premier modèle est sorti en 1957), cette moto mythique n'a jamais quitté la gamme du fabricant de Milwaukee ! En 2021, cette moto a connu un virage conceptuel radical et, quitte à choquer les puristes, va chercher de nouveaux clients. Le pari est-il réussi ?
Chez Harley Davidson, le Sportster constitue souvent le point d'entrée dans l'univers de la marque américaine. D'abord parce que c'est la plus "petite" et légère des motos de la gamme, ce qui permet de se faire la main dans l'univers custom et ses codes un peu particuliers, comme par exemple la position de conduite feet first ou les moteurs big twin très coupleux et moyennement puissants. Ensuite, corollaire de ce premier point, le Sportster est aussi la machine la plus abordable financièrement chez Harley, dans une gamme globalement assez onéreuse.
Jusqu'à l'arrivée de ce nouveau Sportster S 1250, le Sportster était un véritable custom disponible en multiples déclinaisons 883 (Iron, XL...) et1200 (48, 72, Nighster, XR, Roadster...). La nouveauté vient totalement rebattre les cartes car, sous ses allures encore quelque peu custom, il s'agit en fait d'une machine complètement dans les standards modernes et plus proche de ce que l'on retrouve sur un roadster sportif plus classique. C'est que le coeur de l'engin, le moteur 1250, est directement issu de celui du maxi trail Pan America, lequel n'est pas connu pour être mollasson. Il est certes ici assagi en passant de 150 à 120 chevaux, mais enfin... Autant le dire d'emblée, tous ceux qui gardaient le souvenir d'un Sportster fait pour se balader en mode cruising vont devoir revoir la copie. Désormais cette machine peut aller vite, très vite même et la partie "sport" de son nom n'est plus usurpée.
On ne va pas y aller par quatre chemins : j'ai vraiment beaucoup aimé cette moto qui m'a surpris sur de nombreux points. D'abord par son caractère moteur qui n'a plus autant de good vibes que les autres Harley, c'est vrai, mais génère en contrepartie une puissance brute assez jouissive à exploiter ! Même sans utiliser le mode Sport, le 1250 Revolution Max délivre une gouache inédite sur une HD et vous propulse d'une virage à l'autre avec une vigueur équivalente à celle d'autres roadsters sportifs de la concurrence. C'est d'autant plus vrai que le poids de cette moto est enfin devenu raisonnable avec 228 kg, soit une trentaine de moins que sa devancière. Très bonne surprise également côté transmission, avec une boîte de vitesses qui n'a plus rien de "klonkesque" ni de lent. Les rapports sont bien étagés et s'enchaînent de manière fluide, seul le passage de 1 à 2 générant régulièrement un faux point mort sans doute plus lié au positionnement et au débattement du sélecteur qu'à la boîte elle-même. Le freinage de l'engin est également à la hauteur des attentes. J'avoue avoir eu un doute à l'examen de la moto qui ne présente qu'un unique disque de frein avant, mais à l'usage celui-ci remplit complètement et très suffisamment son office. Quant au frein arrière, il faut y aller fort sur la pédale pour que ça produise son effet, mais sans doute cela est-il dû à son manque de rodage sur ma machine d'essai.
Si l'on s'attache au comportement routier de ce Sportster S, il ne souffre pas de critique particulière. Le châssis est très sain et autorise un pilotage viril voire sportif sans ciller. Attention quand même à l'apprentissage nécessaire pour comprendre le fonctionnement du train avant fourbi d'une esthétique mais étonnante roue avant de 160 mm de large, laquelle confère de la progressivité à la mise sur l'angle, mais réagit plus aux irrégularités du bitume, alourdit la direction et peut avoir tendance à faire élargir une trajectoire mal maîtrisée par le pilote. Malgré la notable fermeté de l'amortissement, le confort sur route est tout à fait correct, sans être un point fort. Ca se dégrade en revanche en milieu urbain et à basse vitesse où cette Harley vous secoue sans ménagement sur toutes les imperfections (nombreuses !) de la chaussée. Enfin, malgré son caractère sportif, le Sportster S reste dans l'esprit custom c'est-à-dire bas et avec des repose-pieds qui n'autorisent pas une grosse prise d'angle. Dans les enchaînements de grandes courbes, pas de souci, mais gare aux virages serrés et aux épingles, on a tôt fait de tirer des étincelles !
Comme toute moto, celle-ci n'est évidemment pas parfaite et quelques critiques peuvent être émises à son encontre. D'abord le fait qu'elle chauffe fort, en particulier sur le côté droit. C'est dû au moteur bien sûr, mais aussi aux deux énormes tuyères d'échappement haut placées. En été, dans les étapes en ville à basse vitesse, ça risque d'être une bonne séance de barbecue que de rouler sur cet engin. Pour moi, le réservoir d'à peine 12 litres est aussi un petit handicap car il grève vraiment l'autonomie de cette machine. Devoir rouler en imaginant avoir à refaire le plein tous les 200 km environ, c'est un peu limitant. Pas complètement rédhibitoire eu égard au programme d'utilisation de cette moto, mais bon... Enfin, même si ça ne me concerna pas, c'est purement une moto d'égoïste : malgré l'existence d'un kit passager en option, il suffit de regarder l'architecture de l'arrière de la moto pour comprendre qu'un passager y vivra l'enfer ! Le 1250 Sportster S s'appréciera donc en solo, point barre... Enfin, mais cela est très personnel dans le ressenti, je trouve que cette machine a un peu trop perdu du caractère Harley Davidson typique au niveau sonorité, vibrations et tempérament moteur. Les normes castratrices et l'efficience moderne sont passées par là, au profit de la performance mais au détriment de ce qu'attendent souvent les possesseurs de ce type de motos.
Pour tirer rapidement le bilan de cet essai, je dirai que ce 1250 S est excessivement excitante. D'abord pour son look, encore bien plus sympa en vrai qu'en photo. Ensuite pour son moteur puissant, son comportement routier rigoureux et amusant et son agrément général. Pour son équipement aussi, lequel est hyper complet : ABS sur l'angle, Traction control, modes de conduite, cruise control, keyless, connexion Bluetooth, capteurs de pression des pneus, valves coudées... Finalement, même son prix, qui semble assez élevé de prime abord (un peu plus de 16.000 € en 2022), est assez bien positionné eu égard à tout ce que je viens d'évoquer juste avent. Reste un souci majeur : il est apparemment quasi impossible d'en acheter une pour cette année, le délai de livraison étant de plusieurs mois tant elle a du succès !
Merci à Harley Davidson Grenoble pour cet essai
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